cancer du sein
FemSansCancer, lors d'une sensibilisation dans un marché

Le cancer du sein n’est pas un mythe, mais une réalité. Le mal gagne du terrain et détruit des vies en silence, faute de moyens financiers et d’accès aux soins efficaces. Aujourd’hui, le diagnostic précoce demeure la meilleure arme pour le prévenir. A cela s’ajoute l’urgence de l’accès à la bonne information sur cette maladie trop souvent entourée de mythes qui en compliquent sa gestion. Rencontre avec une survivante du cancer de sein : un témoignage bouleversant à l’occasion d’Octobre Rose.

Le corps étranger

Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez les femmes au Togo. Selon l’Observatoire mondial du cancer (Globocan 2022), 32,9 femmes sur 100 000 sont touchées par le cancer du sein au Togo et 18,1 femmes en meurent chaque année. Ce chiffre alarmant rappelle l’urgence d’agir face à cette maladie avec prévention, sensibilisation, infrastructures et personnel soignant qualifié.

Pour Zénab Moumouni, tout a commencé un matin avec un simple mal au cou. Ce n’était rien d’inquiétant, pensait-elle. Or, c’était bien les symptômes du cancer de sein qui a failli détruire la vie de la juriste et survivante du cancer du sein. En palpant la poitrine, Zénab Moumouni découvre une masse épaisse, du côté gauche, juste en haut de son sein. « Cela ne m’a rien dit car je suis allée à l’hôpital mais c’était pour le mal du cou », se souvient-elle.

A l’hôpital et après le diagnostic du médecin généraliste, la mammographie et la biopsie lui ont été alors prescrites, mais sans résultat probant. La patiente décide alors de consulter un gynécologue. C’est la décision qui lui sauve la vie !

La fourdroyante annonce…

« Ce que je vois ressemble beaucoup à un cancer du sein », annonce le gynécologue à la patiente. « J’étais vraiment dans tous mes états. A la sortie de l’hôpital, au lieu de prendre un moyen de déplacement, je marchais. Le monde était à l’envers », témoigne Zénab, qui ne croyait pas à ce qu’elle venait d’entendre.

Ce jour-là, Zénab Moumouni voit sa vie basculer. « Je suis rentrée à la maison. Toute la nuit je n’ai pas dormi car j’avais peur » peut-elle s’en souvenir encore. Le lendemain, elle se confie à ses proches. Leurs réactions l’enfoncent davantage. « On m’a dit que si j’allais à l’hôpital, j’allais mourir », se rappelle-t-elle. Car, selon les dire, « l’hôpital ne guérit pas le cancer du sein.» Des idées reçues qui retardent le traitement de plusieurs victimes du cancer de sein, les précipitant fatalement dans les bras de vendeurs d’illusion.

Fause route

Désemparée et en manque d’informations fiables, Zénab Moumouni suit les conseils de ses proches et se tourne vers une vendeuse de produits naturels, persuadée que cette dernière détient le remède miracle. La patiente débourse alors 500.000 francs CFA pour acheter les compléments alimentaires censés « faire disparaître la masse en un mois », selon les promesses de la « vendeuse d’illusion ».

« Après cela, j’étais vraiment tranquille car je me disais que j’avais trouvé un remède et que j’allais guérir », s’est réjouie un tant soit peu Zénab.

Cependant, l’espoir s’envole après un mois. Elle constate que la masse était toujours présente et a plutôt du volume. Abandonnée à elle-même, c’est une amie qui l’incite à retourner voir un médecin spécialiste.

La guérison…

« Après le diagnostic, le médecin m’a dit de faire venir mon époux étant donné que le traitement est coûteux », explique Zénab Moumouni, survivante du cancer du sein. Cette fois-ci, elle suit deux chirurgies et un traitement de six mois sur recommandation du médecin, ce qui lui a permis de guérir de son cancer du sein. Le traitement oui, mais à quel coût se demande-t-on souvent . Car, si le traitement du cancer du sein est disponible, il à un coût exorbitant. « Quand on m’a dit : Madame, il faut revenir,  j’ai compris qu’il y a certaines femmes qui ne revenaient pas faute de moyens financiers. » « Le traitement coûte extrêmement cher avec des analyses onéreuses », confie Zénab.

cancer du sein
Guérie du cancer de sein, Zénab Moumouni, juriste et fondatrice de l’association FemSansCancer

La prévention, la solution peu onéreuse

Selon la gynécologue-obstétricienne Adissetou Agbo, le faible taux de diagnostic chez de nombreuses femmes est lié aux coûts élevés des examens et à l’éloignement des structures de santé (peu de centres équipés, personnel limité…), ainsi qu’à la faible sensibilisation et à la persistance de croyances ou tabous, surtout dans les zones reculées.

Or, le diagnostic précoce est essentiel pour lutter efficacement contre le cancer du sein. « Le diagnostic précoce augmente les chances de guérison de la personne atteinte du cancer du sein et réduit considérablement le coût des soins », explique la gynécologue-obstétricienne. Les femmes doivent consulter un gynécologue-obstétricien sans délai, lorsqu’elles constatent une masse au sein ou à l’aisselle, une modification de la taille, de la forme ou de la peau du sein et un écoulement anormal du mamelon recommande-t-elle.

« Si vous sentez quelque chose d’inhabituel dans vos seins, ne tardez pas ; consultez. Le dépistage sauve des vies. Se faire examiner n’est pas une honte, c’est un acte de courage et d’amour pour soi-même et pour sa famille », exhorte la spécialiste, gynécologue-obstétricienne à la clinique ISIS.

Un nouveau combat pour Zénab Moumouni

Aujourd’hui à la tête de l’association FemSansCancer , notre survivante fait de son histoire une arme de sensibilisation contre le cancer de sein au Togo. Son message et son voeu est de voir « chaque femme faire régulièrement l’autopalpation de ses seins.» « Notre association met l’accent sur l’auto-examen pour que cette pratique devienne de l’automatisme chez les femmes et surtout les jeunes filles », insiste-t-elle.

cancer du sein
Des membres de FemSansCancer lors d’une sensibilisation

Elle invite également les autorités à soutenir les campagnes de sensibilisation afin que le message puisse atteindre toutes les femmes, même dans les zones les plus reculées. « La plupart des femmes qui nous appellent disent qu’on leur a détecté un cancer du sein mais qu’elles n’ont pas de moyens pour se soigner. Donc l’État aussi doit subventionner le traitement pour soulager les femmes », recommande Zénab Moumouni, juriste et fondatrice de l’association FemSansCancer.

Au Togo, il existe un plan cancer 2022-2025. En novembre 2024, un centre de traitement de cancer a été annoncé avec la pose de la première pierre.

Julien TCHOUTE

Suivre la chaîne Infos Du Togo sur WhatsApp  :

Chaîne WhatsApp