De nombreuses sportives voient leur rêve de compétitionner au plus haut niveau se briser sur le mur de l’exclusion. Lexi Rodgers (basketball), Halba Diouf (athlétisme) ou encore Imane Khelif (boxe) ont toutes heurté cette barrière en raison de leur taux hormonal. Dans quelle catégorie classer les athlètes transgenres ?
Une chronique de Ben KADE
La Ligue australienne de basketball qui a pris la décision, le mardi 18 avril, d’interdire Lexi Rodgers de compétition admet la « complexité » du dossier. Elle a, pourtant, franchi le pas après l’expertise d’un comité composé d’un médecin sportif et d’un médecin agréé. Lexi Rodgers, qui voulait disputer au championnat professionnel au sein de l’équipe Kilsyth, estime qu’elle a sa « place » dans le basketball féminin d’élite. L’enjeu est donc la place de la femme transgenre dans cet univers sportif.
Athlétisme ferme provisoirement ses pistes
Le conseil de World Athletics (fédération internationale d’athlétisme) a pris la décision le 23 mars dernier « d’exclure des compétitions féminines internationales les athlètes transgenres hommes et femmes qui ont connu une puberté masculine », a annoncé Sebastian Coe, président de World Athletics. L’objectif de cette décision est de « protéger » l’athlétisme féminin, souligne Coe. Cette décision pourrait faire l’objet d’une révision dans un an.
L’absence de preuve est-elle la preuve ?
La cause principale de ces exclusions n’est pas la femme trans en soi, mais la question d’équité. Si l’on se base sur les conclusions de World Athletics, une grande majorité d’individus estime que « les preuves que les femmes trans ne conservent pas un avantage sur les femmes biologiques sont insuffisantes. Ils veulent plus de preuves », poursuit le président de l’instance.
En novembre 2022, le Centre canadien pour l’éthique dans le sport (CCES) soulignait dans un rapport « le manque de données scientifiques et d’études rigoureuses portant sur les athlètes transgenres femmes pour étayer des politiques [d’exclusion] ». Les auteurs de ce rapport ‘’Athlètes transgenres féminines et sport d’élite : examen scientifique’’, qui est un examen de la littérature scientifique et de la littérature grise, mettent en exergue le fait « qu’il n’existe aucune preuve solide que les femmes transgenres jouissent d’un avantage systématique et mesurable sur le plan de la performance globale après 12 mois de suppression de la testostérone. »
World Athletics veut davantage de preuve « avant de prendre en considération l’option d’une inclusion dans la catégorie féminine », ajoute Coe.
Comme on peut le constater, l’absence de preuve suffisante est bien reconnue, mais les conclusions de celle-ci diffèrent. Des fédérations, à l’instar de l’athlétisme, s’opposent à leur inclusion au niveau professionnel. Dans le même temps, le rapport de la CCES invite à « laisser les femmes transgenres compétitionner contre les athlètes féminines ».
Un sujet qui cristallise de plus en plus
« Le sport féminin est pour les femmes. » Ces propos sont ceux de l’ancien intérieur NBA Andrew Bogut. L’ex-international australien exprimait ainsi sa satisfaction quant à la décision de la ligue australienne de basketball d’interdire la pratique de la discipline au niveau professionnel à Lexi Rodgers.
Durant une compétition de dynamophile à Richmond, une banlieue de Vancouver, dans l’ouest du Canada, le groupe International Consortium on Female Sport (ICFS), a protesté contre la participation d’une transgenre avec notamment des autocollants « XY ≠ XX ». Aux États-Unis où le sujet s’invite dans les sphères politique et juridique, le président Joe Biden milite pour une flexibilité à l’échelle scolaire. La Maison-Blanche qui a probablement conscience qu’elle marche sur des œufs dans ce dossier souligne également que l’équité de la compétition ne devrait pas non plus souffrir en raison de l’inclusion.
La question de la femme transgenre dans le sport d’élite est sur la table de réflexion de la FIFA, de World Rugby, du CIO… L’inclusion ou l’équité! Tel est le dilemme que doivent résoudre les associations sportives. Le pavé est lancé dans la mare, à vos analyses.